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Le samedi 23 avril 2022

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Le scandale des paradis fiscaux : Québec doit refuser de vendre Davie

En soi, la présence des paradis fiscaux est un vrai scandale. Mais le fait que nos gouvernements acceptent de faire des transactions avec des entreprises dont le siège social se trouve dans ces pays est encore plus scandaleux. En effet, on peut assez facilement comprendre que dans le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui, où le droit et la réglementation publique n’ont pas suivie la libéralisation économique débridée des 30 dernières années, les États nationaux ne peuvent pas imposer aux entreprises transnationales les mêmes règles qu’elles imposent sur le sol national. Par contre, étant donné qu’il est parfaitement connu, et reconnu par les experts, que ces entreprises se servent des paradis fiscaux pour se soustraire de leurs devoirs, il serait élémentaire pour les États de refuser de faire des transactions avec ces firmes qui jouent ce jeu suicidaire pour nos sociétés démocratiques.

Un jeu suicidaire parce que les pertes fiscales découlant des paradis fiscaux tuent nos sociétés. Selon la plus récente évaluation (été 2012) réalisée par le groupe Tax Justice Network, les actifs des paradis fiscaux s’élèvent à entre 21 et 32 billions (1 billion = 1 000 milliards) $US. La borne inférieure (21 billions) est égale aux PIB cumulés du Japon et des États-Unis. Les grandes entreprises transnationales, les institutions financières de toutes sortes, les grandes fortunes et le crime organisé profitent de ces paradis fiscaux pour cacher l’argent du crime ou éviter de payer leur part équitable d’impôt. Par exemple, en estimant un rendement très conservateur de 3% et un taux d’imposition de 30%, cette évasion fiscale peut être évaluée à entre 190 et 290 milliards $ de revenus fiscaux perdus pour les États.

On peut aller consulter le numéro spécial de la revue vie économique pour avoir une vue d’ensemble sur le problème, mais voici un exemple récent d’un cas d’évasion fiscale coûteuse pour un États : selon un rapport récent d’un comité du Sénat des États-Unis, Microsoft a utilisé les transactions avec des filiales situées à Porto Rico, en Ireland, à Singapour et aux Bermudes pour sauver 6,9 milliards $ en impôt à payer au gouvernement fédéral. On évalue que pour Apple ce serait 2,4 milliards $. Ce qui n’empêche pas ces deux entreprises d’être membre de la coalition WinAmerica qui demandait au Congrès d’avoir un congé de taxes lorsqu’elles rapatriaient des profits de leurs filiales vers les États-Unis… La coalition a été dissoute après avoir échoué dans leur tentative.

Alors, que vient faire la Davie (du titre) dans cette histoire ? Selon le Devoir, le cabinet de la ministre déléguée à la Politique industrielle, Élaine Zakaïb, aurait approuvé le rachat du chantier maritime Davie par l’entreprise Zafiro Marine, de Monaco (à la suite d’une recommandation d’Investissement Québec). Zafiro, une entreprise spécialisée dans la location de navires, détenue par un fonds d’investissement de Chypre appartenant à la société V.Group, avait déposé une offre pour acquérir Davie. V.Group, qui a comme actionnaire principal un fonds d’investissement détenu par OMERS, la caisse de retraite des employés municipaux de l’Ontario, est établi dans l’île de Man (un paradis fiscal du Royaume-Uni) et gère une flotte de plus de 700 navires dans une trentaine de pays. Comment peut-on continuer à dépenser sans compter l’argent des contribuables dans des affaires comme celles-là, dont on sait pertinemment qu’elles encouragent l’évasion fiscale, si ce n’est tout simplement le crime organisé.

Pourtant le cas d’Aveos est encore frais dans nos mémoires. L’adresse officielle de la maison-mère d’Aveos, Aveos Holding Company, est elle-même aux îles Cayman, ce qui rendait à toute fin utile impossible toute poursuite sérieuse contre elle. La liste des entreprises, créanciers, banques, et autres entités concernées par ces procédures judiciaires, en surplus de la compagnie Aveos, d’Air Canada, des syndicats, et des différents paliers de gouvernements, inclut plusieurs banques situées dans des paradis fiscaux offshore, notamment une banque aux Îles Cayman, ainsi qu’une autre en Suisse. En plus d’Air Canada qui possèderait encore 17% des parts d’Aveos, lors de la faillite, les principaux propriétaires d’Aveos seraient des investisseurs privés via deux grands fonds d’investissement (KKR et Sageview Capital) ainsi que d’autres intérêts financiers basés au Luxembourg.

C’est inconcevable que le gouvernement Marois embarque encore une fois le Québec dans une telle galère en faisant affaire avec une entreprise basée dans un paradis fiscal. C’est de l’inconscience !

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